Quand je serai dans ma tombe de bois, je viendrai parcourir ta sève pour marcher encore dans la tempête. Frapper ton poitrail pour que tu m’ouvres le ciel. Frapper trois fois. Secouer les cheveux des fruits d’été. Laisser partir dans l’air le flocon des fleurs.
Devenir le printemps. Devenir l’automne. Ce qui rampe sous les feuilles. Ce qui bleuit les doigts de pierre. Devenir un cœur chantant sous le soleil de quatre heures. Une fenêtre mangée par le vent.
Quand tu me prendras dans ta bouche d’ombre, je me laisserai faire. Je glisserai comme la nuit, comme la vie partie sans dire au revoir. Je disparaîtrai comme le jour, la maison, la minute des hommes.
Devenir toi. Devenir les branches tendues des soupirs. Devenir la forêt. Ce qui tombe, ce qui meurt. Ce qui se met debout. Ce qui lève comme le pain, le front des années ou la graine perdue. Devenir des racines. Tronc. Chose approchée comme un regard.
Frapper ton poitrail pour que tu m’ouvres le ciel. Frapper trois fois. Et vivre dans l’oiseau.
Quand je serai dans ma tombe de bois, je roulerai ma main dans la tienne. Je viendrai me souvenir du passage des troncs, et de moi, homme, franchissant les montagnes. Prier la rivière qui chante sous la brume. Courir me cacher du renard ou du loup. Chevaucher les nuits où toi, frère-arbre, tu rassembles la lune.
Devenir l’hiver. Devenir le brouillard qui jappe en passant, qui devient une pluie ou parfois une saison. Devenir l’été qui a perdu ses mots. Ce qui attend sa semence. Ce qui patiente d’ombre. Ce qui ne compte plus le temps. Une plume. Une goutte au bord du jour. Un rire.
Je disparaîtrai comme le vent qui arrive, la promesse d’une bouche, le clapotis d’un lac. Devenir la terre et tout dessous la vie. Ce qui dort sans penser à demain. Le ventre arrondi des coquelicots et l’ épousaille des roches. Morceaux tombés qui ont perdu leur cœur. Qui ont trouvé leur centre.
Frapper ton poitrail pour que tu m’ouvres le ciel. Frapper trois fois. Et vivre dans l’oiseau.
Mourir, ne pas mourir. Et c’est pareil. Car tout devient.
Je viendrai dans la moisson du vent. Je viendrai, mort pas mort. Homme pas homme. Je viendrai, arbre ardent et plein de sève. Car je serai devenu. Enfin vivant après la vie, après la mort. Après mon corps d’humain. Je serai devenu ce cœur de bois, ce cœur battant. Devenu arbre.
Et vivre dans l’oiseau.
Et ne plus confondre les pleurs et les fleurs. Ne plus tomber dans l’oubli du temps qui passe. Ne plus attendre. Ouvrir grande la bouche du vivant.
Et vivre dans l’oiseau.
BIENTOT ROZEN EN LIVE, SI LE VENT NOUS L'AUTORISE ... A SUIVRE !
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